leo.lorelieke
Grenier de poèmes
Ce n'est pas de ton âge / Hollie McNish / traduction de Valérie Rouzeau
0:00
-0:29

Ce n'est pas de ton âge / Hollie McNish / traduction de Valérie Rouzeau

Je souhaite seulement que tu fasses quelque chose de toi, éditions Le Castor Astral, 2023

Je remets le début de la lettre précédente sur Hollie McNish, au cas où.

Hollie McNish est une poétesse, écrivaine et performeuse. Elle vit entre l’Ecosse et l’Angleterre. Je veux seulement que tu fasses quelque chose de toi est son deuxième livre traduit en français après Personne ne m’a dit. Elle est traduite par Valérie Rouzeau, traductrice et poétesse (entre autres Vrouz et Va où).

Les poèmes d’Hollie McNish me font l’effet d’une main sur l’épaule ou d’une tasse de thé tendue par une amie. Ils sont de la vie et de tous les jours, ils parlent de nos corps vivants et de nos morts. Ils me font sourire et rire. Même si parfois, le rire est un peu acide. Ils parlent de que c’est d’être une femme ou une fille, ici et maintenant, quelque soit sa génération. Et pas seulement, bien sûr, pas seulement.

Vous pouvez l’écouter lire des poèmes de ce recueil en anglais et en français ici à la maison de la poésie de Paris (très chaleureusement recommandé). Et elle était chez Manou Farine1 en 2023.

J’aime beaucoup ce poème qui parle de mon âge à peu près, et de l’âge de nombreu-ses amixes.

J’aime me rendre compte que ça devient de plus en plus confortable. Et de voir les amixes plus âgées le confirmer juste en vivant.

Et savoir qu’un jour, sans doute, ça le sera moins.

Je ne regrette pas mon adolescence.

Elle n’a pas été confortable.

Elle a eu sa foule de silences, de violences, de choses qu’on fait pour protéger, d’autres pour transgresser, s’opposer.

Et esseulée.

Enfin, c’est ce que j’ai cru. Comme beaucoup.1

Car dans tout ça, il y a eu des joies, une île, des amies et la rencontre de la poésie : ce prof de 4ème qui nous a mis Arthur Rimbaud et Pablo Neruda dans les mains - et qui sera ensuite considéré comme un obsédé par toute la classe, bien sûr. Jacques Prévert. Blaise Cendrars. Puis Emily Brontë, Federico Garcia Lorca, le vieux Walt. Ma bibliothèque s’est étoffée doucement au hasard des Emmaüs, des dons de livres, des librairies des vacances. Aujourd’hui, ça déborde des étagères et des meubles.

Je n’ai qu’à tendre la main, de mon lit, pour attraper un livre rempli d’elle.

Poésie.

Je peux dire qu’elle m’a sauvé la peau, mais ce ne serait pas juste pour les amixes, mes mains, mes sens, les chats, le granit rose, la mer et les plantes.

Ça ne serait pas juste pour les lesbiennes qui m’ont donné un foyer dans leurs maisons de briques, quand le mien pleurait. Et nourrie de musique et de tartines de pindakaas met muizenstrontjes.2

Je vais essayer d’enregistrer les poèmes qui me rattrapent quand ça ne va pas. Ceux qui reviennent et que je vais chercher parce qu’ils sont des outils pour revenir à soi et au monde ou a minima ils m’aident à tenir.

Je vais les indexer sous une page Poèmes de secours.

Pas trouvé mieux pour le moment.

Mais ça aurait aussi pu être : révolution, rage bienvenue, voix amie, plat délicieux, champs de myosotis et boutons d’or, odeur d’ajonc ou de tilleul, vieux pull confortable, moustache de chat frôlant la joue, tasse posée par main aimante sur la table de nuit du matin, vache dans un pré, lire un livre à une enfante ou même robe d’été.

Toutes ces autres choses qui sont secours.

Comme ce poème.

ce n’est pas de ton âge

quand je m'amuse
les gens me disent
"tu te comportes encore
comme une adolescente"

oh que non.

je me comporte comme
une femme
de trente ans

être adolescente
n'a jamais été
aussi confortable
que ça

Et en passant encore une chanson de Dominique A, fredonnée reconnue à la seconde dans Là où nul ne nous attend.

Pauline Laidet et Virginia Woolf, places prises à l’aveugle parce que j’aime beaucoup les deux. Vu la pièce vendredi soir, et restés dans cette douce mélancolie de la vie tout le trajet à pied du théâtre jusqu’au Bull.

C’était bon d’être sur la crête d’être humain. Malgré toutes les terreurs.

Réconfort à toustes.

Un autre poème de Hollie McNish ici:

Recevoir un compliment / Hollie McNish / traduction de Valérie Rouzeau

·
May 27
Recevoir un compliment / Hollie McNish / traduction de Valérie Rouzeau

Hollie McNish est une poétesse, écrivaine et performeuse. Elle vit entre l’Ecosse et l’Angleterre. Je veux seulement que tu fasses quelque chose de toi est son deuxième livre traduit en français après Personne ne m’a dit.

1

Il me semble que pour toustes, ou du moins la plupart, dans les sociétés occidentales contemporaines, l’adolescence est à un moment ou l’autre, une douleur ou un isolement. Et c’est articulé sur une maltraitance socialement organisée, fortement répressive.

2

En flamand : beurre de cacahuète et vermicelles de chocolat.

Et pour la musique : Leonard Cohen, Nick Cave, Sinead O’Connor, Tori Amos, Suzanne Vega, Loreena McKennit, Tom Waits, Luka Bloom, dEUS.

Discussion à propos de cet épisode

Avatar de User